La nouvelle politique budgétaire lettonne

Le gouvernement a pris de graves décisions dont une qui surpasse sans doute toutes les autres. Un impôt sur les hauts salaires va être crée. On pourrait croire à un revirement de politique vers la gauche après que le parti de centre gauche a remporté les élections municipales et européennes mais il ne faut se tromper, il s'agit en fait de justifier beaucoup de mesures qui vont toucher les plus faibles. En effet, le gouvernement letton a choisi de diminuer également le minimum non-imposable qui permet aux petits salaires de se garantir un peu contre l'impôt sur le revenu qui est à 23%. Le salaire minimum passe de 180 à 140 lats (253,8 à 197,4€), le salaire des fonctionnaires est à nouveau diminué, les retraites aussi et la taxe sur la bière va augmenter.

Je sais que la dernière mesure paraît la plus dure mais c'est sans doute pour occulter ce qui se présente à l'horizon 2010 et 2011. La TVA et l'impôt social pourrait bondir à leur tour, accompagné de l'impôt sur l'immobilier.

Quand je pense qu'il y a un an il fallait moins d'une demi-heure pour avoir un crédit jusqu'à 1500€ et qu'on voyait des porshes Cayenne faire la course avec des hummers dans le centre ville de Riga, on se dit que le temps de l'abondance n'a pas été profitable à tout le monde et que finalement c'est une bonne leçon de capitalisme. Les lettons ont su dilapider très vite la richesse qu'ils pouvaient acquérir parfois à l'encontre de l'environnement, souvent à l'encontre de leur propres intérêts puisque la consommation à crédit a nourri l'inflation.

Aujourd'hui, le crédit est hors de prix. Ceux qui en avait pris essayent de le(s) rembourser avec pour certains un salaire diminué de moitié, pour d'autres l'indemnité chômage. Le nombre de voitures a diminué à vu d'œil et la bulle des prix de l'immobilier ne cesse de se dégonfler au profit de ceux qui ont conservé leur travail. La situation ressemble à un début de déflation, les prix baissent de partout, principalement dans l'alimentation. Quand le crédit était accessible à tous, les prix dans le commerce bondissaient d'un mois sur l'autre, maintenant, l'entente entre marchands est finie est la concurrence s'est installée. Les magasins qui ne savent pas offrir un prix correspondant à leur marchandise ferment, les autres s'adaptent. Finalement, cela va dans le sens de la nature. La consommation baisse dans la mode comme dans l'automobile, cela se répercute sur la consommation de combustible. C'est juste dommage que cela se fasse à l'encontre des gens. Quand à l'époque de la croissance à deux chiffres, je disais que cela ne pouvait pas durer et qu'il fallait être prudent, qu'il fallait payer l'impôt social pour toucher le chômage en cas de coup dur, les gens me regardaient bizarrement en pensant : "il sait mieux que tout le monde". Maintenant que l'histoire m'a donné raison, les gens continuent d'essayer de contourner l'imposition mais sont plus prudents dans leur façon de consommer. Je souhaite pour beaucoup que ça ne dure pas mais j'ai espoir que ça change les habitudes, fasse consommer plus local et moins.

Je me souviens toujours de la blague que m'avait racontée Nora la première semaine que j'ai passée en Lettonie.

Trois hommes sont devant une vache, un allemand, un français et un letton.
L'allemand dit : "quelle formidable machine qui arrive à produire du lait à partir d'herbe, il faut que je comprenne cette mécanique"
Le français dit : "elle a l'air de donner beaucoup de lait, on doit certainement pouvoir faire du bon fromage avec"
Le letton dit : "je me demande bien ce qu'elle peut penser de moi"

C'est ce "que peut-elle bien penser de moi?" qui permet de comprendre pourquoi le letton a couru vers la consommation à outrance et à crédit. Il se demandait ce que son voisin allait penser de lui s'il n'avait pas le portable dernier cri, le plus gros 4x4 et la plus grande maison. C'est aussi cette phrase qui pousse le letton à accepter en silence des mesures qu'il juge injustes car s'il manifeste son désaccord, on va sans doute penser qu'il est poussé là par la misère.